Les cerfs-volants - Romain Gary
Si vous lisez l'ouvrage, vous y retrouverez les thèmes chers à l'auteur: l'amour bien sûr, la fraternité, la liberté de penser et d'agir, le pouvoir de l'imagination et l'espoir en l'avenir,...
Ci-dessous quelques extraits, pour vous donner envie.
C’est tellement beau. Tellement bien écrit. Tellement vivant et touchant...
Quel dommage que cet ultime ouvrage soit en quelque sorte son "testament littéraire" et que l'espoir l'ait abandonné.
Bonne lecture ;)
« C'était la première fois que j'utilisais l'imagination comme arme de défense et rien ne devait m'être plus salutaire dans la vie. »
« Elle avait un visage aux traits si fins qu'on avait envie de la prendre au creux de la main et une vivacité harmonieuse dans chaque mouvement qui m'avait permis d'avoir une très bonne note à mon bac de philo. J'avais choisi l'esthétique à l'oral et l'examinateur, excédé sans doute par une journée de travail, m'avait dit :
- Je ne vous poserai qu'une question et je vous demande de me répondre par un seul mot. Qu'est-ce qui caractérise la grâce ?
Je pensai à la petite Polonaise, à son cou, à ses bras, au vol de sa chevelure, et je répondis sans hésiter :
- Le mouvement.
J'eus un dix-neuf. Je dois mon bac à l'amour. »
« Il y a longtemps que toute trace de haine pour les Allemands m'a quitté. Et si le nazisme n'était pas une monstruosité inhumaine? S'il était humain? S'il était un aveu, une vérité cachée, refoulée, camouflée, niée, tapie au fond de nous-mêmes, mais qui finit toujours par resurgir? Les Allemands, bien sûr, oui, les Allemands... C'est leur tour, dans l'histoire, et voilà tout. On verra bien, après la guerre, une fois l'Allemagne vaincue et le nazisme enfui ou enfoui, si d'autres peuples, en Europe, en Asie, en Afrique, en Amérique, ne viendront pas prendre la relève. »
« Mon professeur de français, M. Pinder ne fut fâché qu'une seule fois lorsque, récitant Les Conquistadors, dans mon désir de me surpasser, j'entrepris de dire le poème à l'envers, en commençant par le dernier vers. M. Pinder m'interrompit et me menaça du doigt.
- Mon petit Ludovic, je ne sais si tu te prépares ainsi à ce qui semble nous menacer tous, c'est à dire à une vie à l'envers, dans un monde à l'envers, mais je te demande au moins d'épargner la poésie. »
« Et rien n'était plus commode, pendant et depuis l'occupation, que de réduire l'Allemagne à ses crimes et la France à ses héros. Mais qu'un des chefs les plus prestigieux de la Wehrmacht pût être, au fond de lui-même, tellement convaincu de l'approche de la défaite qu'il allât jusqu'à chercher l'oubli en prenant, auprès d'un chef français, des leçons de haute cuisine, me paraissait contraire à tout ce que signifiait pour nous l'expression "général allemand". La haine se nourrit de généralités et "une tête typique de Prussien" ou "un spécimen parfait de la race des seigneurs", voilà qui nous met à l'aise lorsqu'il s'agit d'étendre le champ de nos ignorances. »
« Lila demeurait blottie dans mes bras et je ne m'étais jamais encore senti aussi présent dans ses silences.
- On se prépare des souvenirs, disait-elle. »
« - [Ludo] Pourquoi ne viens-tu pas me voir?
- [Lila] Je viendrai. Il faut que je me retrouve, tu sais. Tu penses un peu à moi?
- [Ludo] Il m'arrive de ne pas penser à toi. Des passages à vide, ça arrive à tout le monde. »
« Il croyait au malheur parce qu"il était seul. L'espoir a besoin d'être deux. »
Derniers commentaires
J. D'ORMESSON n'est plus! Nous qui avons suivi Audrey au long de cette année ainsi qu' à travers son livre nous devinons son émotion mais lui souhaitons la même ferveur inépuisable d écrire! Réagisse
Le plaisir à te lire est nourricier comme la rosée apporte la fraicheur à une fleur qui a soif.
Que tu sois faite pour écrire est un fait que tu doives continuer une évidence
C'est peut-être différent selon les "uns et les autres"
Avec "Michel Polnareff "